Municipales : la fin de l'ère des bâtisseurs

Surtout, ne pas dépenser plus et ne pas augmenter les impôts. Pour les électeurs, le temps n'est plus aux maires bâtisseurs, mais à une gestion de bon père de famille, sans négliger la dimension sociale, selon des élus et les enquêtes d'opinion.

Le poids des impôts locaux, avec en toile de fond le niveau des prélèvements obligatoires, "va donner la tonalité d'une partie de la campagne électorale pour les municipales", assure Jérôme Fourquet, de l'Ifop.

A Paris, où la campagne a commencé très tôt, c'est l'un des sujets-phares. La socialiste Anne Hidalgo promet de ne pas accroître la pression fiscale - la capitale est pourtant l'une des villes où elle est la plus faible -, tandis que Nathalie Kosciusko-Morizet (UMP) prétend réduire les dépenses d'un milliard d'euros sur la durée du mandat (2014-2020).

D'habitude prime la capacité prêtée aux candidats à maintenir ou attirer des emplois dans leur cité, synonymes de dynamisme économique. Cette fois, dans les enquêtes réalisées par Harris Interactive, TNS Sofres, CSA, Ifop, trois thèmes dominent, "chez les électeurs de droite comme de gauche", précise Jean-Daniel Lévy (Harris) : fiscalité, sécurité, emploi. Avec cette nuance que, plus on est de droite, plus la pression fiscale mécontente.

"Le sujet numéro un, c'est : +allez-vous augmenter les impôts ou pas ?+", assure Jacques Remiller, maire UMP de Vienne (Isère). Ses collègues socialistes ne disent pas le contraire.

Exit l'époque des grands chantiers transformant le visage de toute une ville - symbolisée par l'ancien maire de Montpellier Georges Frèche. "On n'est plus du tout dans les grands projets d'avenir structurants ou l'offre de nouveaux services gratuits", affirme Jérôme Fourquet. A l'entendre, soit les électeurs n'y croient plus parce qu'il n'y a "plus assez d'argent dans les caisses", soit ils pensent "que c'est nous, les contribuables, qui allons payer la facture". La méfiance se serait donc installée. Au point que 61% des Français jugent désormais "nécessaire de faire des économies" sur les dépenses publiques "quitte à fermer certains services publics" (sondage Ifop publié le 2 décembre).

Modération fiscale à l'approche de l'élection

"Pour une partie des Français, les impôts locaux pèsent jusqu'à un mois de salaire", explique M. Lévy, alors même que, pour la première fois depuis 1984, le pouvoir d'achat a diminué (- 0,9%) l'an dernier. La question est d'autant plus sensible, complète M. Fourquet, que "quasiment tout le monde paie des impôts locaux", la proportion n'étant que d'un sur deux pour l'impôt sur le revenu.

A tort ou à raison, les contribuables reprochent aux communes et groupements de communes d'avoir la main lourde. En octobre, la Cour des comptes a recommandé aux collectivités locales de "freiner" leurs dépenses qui, "à périmètre constant", ont progressé chaque année depuis 30 ans de 1,4 point de plus que l'inflation. Elle s'est étonnée aussi que l'essor des communautés de communes, d'agglomération, etc., n'ait "pas été générateur d'économies, bien au contraire".

Depuis trois ans, à l'approche du scrutin, le mot d'ordre est à la modération. Pour 2014, 69% des maires prévoient une stabilisation de la pression fiscale, selon une enquête Association des maires de France/Banque postale.

Cette prime au moins-disant fiscal ne condamne pas ipso facto les maires qui ont beaucoup investi. En fait, "les gens veulent en avoir pour leur argent", commente Jérôme Fourquet, et peuvent très bien décider de reconduire le maire sortant si "la ville a été positivement transformée et offre une meilleure qualité de vie". "Une troisième ligne de tramway, ça se voit", résume le chercheur.

Sans compter que, en tête des points forts de l'action municipale, les administrés mentionnent les services publics, l'entretien des écoles et le périscolaire, l'aide sociale aux familles, selon une étude de novembre de Harris Interactive.

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