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Le Blog de Daniel HUE le Crouycien
15 décembre 2011

Jacques Chirac, premier chef d'Etat de la République condamné

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Jacques Chirac est entré jeudi dans l'Histoire comme le premier ancien chef d'Etat républicain à être condamné par la justice, une décision qui rouvre le débat sur l'immunité pénale dont jouissent les présidents français.

Il a été condamné à deux ans de prison avec sursis pour des détournements de fonds publics commis dans les années 1990 après 13 ans d'une procédure retardée par la protection dont il a bénéficié pendant 12 ans à l'Elysée.

Après un procès en septembre dont il était absent pour raisons de santé, le tribunal correctionnel de Paris l'a déclaré coupable de 19 emplois fictifs de "chargés de mission" à son cabinet de maire de Paris en 1993-1995.

Contre l'avis du parquet qui avait requis la relaxe, les juges retiennent aussi les incriminations "d'abus de confiance, ingérence et prise illégale d'intérêt" et se montrent sévères dans leurs attendus, où ils reprochent à l'ex-maire de Paris (1977-1995) d'avoir "manqué à l'obligation de probité" imposée aux élus gérant l'argent public.

Cette affaire, point d'orgue de 15 années "d'affaires" où des proches de Jacques Chirac ont été condamnés parfois sévèrement, voire emprisonnés, sans jamais qu'on puisse demander des comptes à leur chef, relance déjà la débat sur l'immunité pénale du chef de l'Etat, un dispositif introduit dans la Constitution en 2007 par ce même Jacques Chirac.

APPEL INCERTAIN

Un appel est encore possible, auquel cas il y aurait un second procès dans un délai d'environ un an. Les défenseurs de Jacques Chirac ont annoncé que sa décision serait connue le moment venu et que l'ancien président était serein.

Agé de 79 ans, Jacques Chirac avait été dispensé de comparaître en raison de problèmes de santé, troubles de mémoire et problèmes neurologiques. Il n'était pas présent au tribunal. Il s'est retiré du Conseil constitutionnel dont il est membre de droit mais n'a pas démissionné.

"Le jugement peut apparaître comme décevant mais il faut tenir compte de la grande modération du tribunal qui est venu rappeler les qualités personnelles du président Chirac, l'ancienneté des faits et également le rôle qu'il avait pu jouer dans l'organisation de l'encadrement du financement des partis politiques", a déclaré son avocat, Georges Kiejman.

Un autre de ses avocats, Jean Veil, a insisté sur RTL sur le fait qu'il n'y avait pas eu d'enrichissement personnel.

Les réactions de la classe politique ont été diverses.

Si la candidate écologiste à la présidentielle de 2012 s'est montrée satisfaite - "justice est faite", a-t-elle dit -, tout comme le porte-parole du PS Benoît Hamon - "c'est une bonne nouvelle" -, les proches de Jacques Chirac, dont sa fille adoptive, ont jugé la sanction trop sévère pour des faits aussi anciens.

Sept des neuf autres prévenus sont sanctionnés, dont l'ex-patron du syndicat FO Marc Blondel, dispensé de peine mais déclaré coupable car son garde du corps était payé par la Ville, et le petit-fils du fondateur dela Ve République Jeande Gaulle, frappé de trois mois de prison avec sursis pour avoir bénéficié à titre personnel de chargés de mission.

Les autres prévenus sont frappés de deux à quatre mois de prison avec sursis. Il y a deux relaxes, dont celle de Michel Roussin, ex-directeur de cabinet de Jacques Chirac à la Ville.

Jacques Chirac encourait en théorie pour ces faits jusqu'à dix ans de prison et le tribunal précise dans ses attendus que le sursis n'est dû qu'à l'ancienneté des faits, à son âge, sa maladie et son passé de chef d'Etat.

UN TOURNANT

Au procès, les avocats de l'ex-maire de Paris avaient soutenu qu'il fallait préserver l'image dans l'Histoire de celui qui fut plusieurs fois ministre à partir des années 1960, deux fois Premier ministre (1974-1976 et 1986-1988) et douze ans chef de l'Etat (1995-2007).

"Si vous condamnez, vous direz que la France a été dirigée pendant 12 ans par un petit comptable indélicat", avait dit Me Georges Kiejman.

L'actuel maire socialiste de Paris Bertrand Delanoë avait retiré avant l'audience la partie civile de la Ville en échange d'un remboursement de 2,2 millions d'euros, dont 500.000 € acquittés par Jacques Chirac et le reste par l'UMP.

L'audience, malgré l'absence de Jacques Chirac ou à cause d'elle, ne lui a pas été favorable. Son rôle personnel est apparu étayé.

Les pseudo-spécialistes des Africains, des Chinois ou de l'agriculture, les épouses de dignitaires RPR, le garde du corps de Marc Blondel, les amis et les "petites mains" de partis proches n'ont pas servi les Parisiens mais perçu des fonds publics par la volonté de Jacques Chirac, ont dit les témoins.

Ce procès pourrait marquer un tournant. La gauche et le centre estiment en effet qu'il faut réformer le statut d'immunité pénale totale du chef de l'Etat, qui aboutit à leurs yeux à un privilège judiciaire et un dysfonctionnement démocratique, puisqu'un président accusé de graves délits n'a pas de comptes à rendre.

Edité par Yves Clarisse

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