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Le Blog de Daniel HUE le Crouycien
19 mars 2015

Menus sans porc : qui, du FN ou de l'UMP, court après l'autre ?

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ANALYSE - En se prononçant pour la suppression des menus de substitution, Nicolas Sarkozy va plus loin que Marine Le Pen.

Depuis quelques années, la vie politique française était simple. Quand venait le temps d’une campagne électorale, l’UMP se mettait à cavaler derrière le FN, droitisant son discours, enfourchant les thèmes de la laïcité, de l’immigration ou de la justice laxiste… Mais voilà, en se prononçant, à quelques jours du premier tour des départementales, pour la fin des menus de substitution dans les cantines scolaires, Nicolas Sarkozy n’a pas simplement emboîté le pas de Marine Le Pen, il a carrément doublé le FN sur sa droite. A toute berzingue, même. Car si la laïcité en milieu scolaire est un sujet qu’il aime à agiter, jamais le FN, ces dernières années, n’est allé aussi loin, et n’a été aussi explicite, que le nouveau président de l’UMP.

L'an passé, lors de la campagne des municipales, le FN avait mis le sujet sur la table, mais sans grande clarté. Florian Philippot, dans le cadre de sa campagne à Forbach, promettait bien un menu unique… Mais Steeve Briois, maire d’Hénin-Beaumont, semblait jurer le contraire. Interrogé le 24 mars sur les propos de Najat Vallaud-Belkacem selon laquelle les maires FN voulaient «obliger les enfants à manger du jambon dans les cantines», Briois avait accusé la ministre de «délirer». Marine Le Pen elle-même avait entretenu l’ambiguïté quant à la ligne du parti sur le sujet. Sur RTL, le 4 avril 2014, elle avait montré les muscles en affirmant : «Nous n’accepterons aucune exigence religieuse dans les menus scolaires.» Sans guère préciser ce que ce coup de menton impliquait…

La déclaration avait été comprise par les médias comme un engagement à remettre en cause des menus de substitution. Mais le FN avait rétropédalé illico, invoquant un malentendu : en substance, Marine Le Pen s’engageait à faire revenir le porc dans les cantines où il avait disparu… sans pour autant mettre en cause les menus alternatifs qui existent.

Marine Le Pen avait ainsi rectifié elle-même via twitter :

Tweet Marine Le Pen

Un élément de langage répété quasi-mot pour mot par Philippot sur BFM dans la foulée :«J’ai entendu beaucoup de bêtises sur ce qui a été dit par Marine Le Pen, des gens qui veulent créer des polémiques pour créer des polémiques. Nous sommes défavorables à l’interdiction du porc.» Il ajoutait : «Cette polémique est creuse, puisqu’il y a déjà dans la plupart des cantines scolaires plusieurs menus proposés aux enfants.»

Encore plus clair, le maire FN de Fréjus, David Rachline, dans une interview à Var Matin, toujours le 4 avril, regrettait «l’interprétation qui a été faite des propos de Marine Le Pen» et rappelait qu'«il y a toujours eu deux menus dans les cantines: l’un avec porc, l’autre sans porc pour ceux qui ne désirent pas en consommer. Naturellement, cette possibilité sera préservée dans les cantines de Fréjus, l’essentiel étant que la liberté de chacun soit préservée».

Moins d’un an après, toutes les mairies FN que nous avons pu joindre (Le Luc, le Pontet, Beaucaire, Mantes-la-Ville, Fréjus, Cogolin, Béziers) proposent d’ailleurs des menus de substitution. Parfois sur un ton d’évidence. «Nous avons une communauté musulmane, dit-on au cabinet du maire de Cogolin. Il y a toujours un menu de substitution quand du porc est au menu, mais nous servons du poisson le vendredi comme plat unique. Ce compromis est accepté de tous et fonctionne parfaitement, loin de toute polémique.» Curieux retournement où une mairie FN prônerait presque le vivre ensemble quand l'UMP entend imposer du cochon à tout le monde...

D’où cette situation assez inédite, où on a vu le FN contraint de durcir son discours pour rester dans la roue de Nicolas Sarkozy. Sur Radio Classique, mercredi soir, Florian Philippot a fermement condamné les menus de substitution… qui sont donc pourtant proposés dans les mairies frontistes. Interrogé sur les menus alternatifs, le numéro 2 du FN s’est fâché : «Cela ne peut être les considérations d’une cantine scolaire… ou il n’y a plus de limite. C’est le repas de substitution, puis ce sera les horaires de substitution dans les piscines, puis ce sera les jours fériés de substitution comme ils l’ont fait outre-mer, et puis un jour ce sera la loi de substitution dans les quartiers. Ce ne sera plus la loi de la République».

Même indignation dans la bouche de Nicolas Bay secrétaire général du FN, dénonçant, sur le site de Boursorama des demandes «inacceptables», et rappelant à «ceux qui ne veulent pas manger à la cantine» qu’ils «peuvent aller manger à l’extérieur».

Et voilà comment le FN court désormais derrière l’UMP qui court derrière le FN.

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