Taubira "au bagne": Hollande et Valls montent au créneau pour défendre la ministre

Cette fois-ci, le gouvernement n'a pas raté l'occasion de soutenir sa ministre de la Justice. Le président de la République François Hollande et son premier ministre Manuel Valls ont tous deux exprimé ce mercredi 11 mars "indignation" et "colère" après de nouvelles attaques visant Christiane Taubira d'une élue municipale proche de l'UMP de Juvisy-sur-Orge.

Le commentaire incriminé a été tenu le 8 mars sur la page personnelle, mais accessible, d'une habitante, qui avait partagé un lien contre la garde des Sceaux: "13.000 vols, 2.000 agressions et 200 viols par jour et le vidage des prisons va commencer..."
"C'est pitoyable d'avoir une telle ministre de la Justice. Elle vient de Cayenne, là où il y avait le bagne, qu'elle reparte là-bas vu qu'elle a toujours détesté la France", écrit l'élue dans les commentaires, des propos retirés depuis de la page.
Des propos qui ont indigné le chef du gouvernement qui s'en est ému auprès de la presse en marge du conseil des ministres. "Je veux dire, et nous l'avons partagée en Conseil des ministres, une nouvelle fois notre indignation, notre colère face aux propos racistes, antisémites, homophobes, sexistes qu'on voit se répandre avec une très grande facilité; notre indignation et notre colère à l'égard des propos vis-à-vis de Christiane Taubira", a déclaré Manuel Valls.

François Hollande lui-même s'est exprimé sur le sujet en dénonçant des attaques "inqualifiables", selon le compte-rendu du porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll. "Le président de la République a souligné que les attaques qui étaient portées vis-à-vis de la garde des Sceaux étaient inqualifiables", a affirmé le chef de l'Etat, soulignant qu'"à un moment, il faut aussi rappeler que dans le débat politique on n'est pas obligé de tomber dans l'irrespect, l'indignité", a-t-il indiqué.

"Les digues se sont brisées"

Invitée à réagir ce matin sur RTL, Christiane Taubira s'est expliquée sur sa discrétion après les attaques répétées contre sa personne. "(Je ne réagis) pas à ça, parce que c'est juste lamentable. Ça n'a pas d'importance. C'est surtout fréquent. L'important n'est pas ma personne", a-t-elle déclaré.

Encore récemment, un candidat UMP aux élections départementales a été épinglé pour avoir partagé une caricature raciste représentant Christiane Taubira en guenon.

Depuis sa nomination au ministère de la Justice, la garde des Sceaux est prise systématiquement pour cible par la droite et l'extrême droite. L'élue de Guyane est régulièrement accusée d'incarner une ligne jugée trop à gauche et laxiste. La semaine dernière, l'attaque du député UMP Gérald Darmanin qui l'avait qualifiée de "tract ambulant pour le FN", a déclenché une nouvelle polémique. Certains députés socialistes ont accusé l'UMP de mener une attaque à caractère raciste et sexiste contre la ministre.

"Ça suffit. Il faut qu'il y ait bien plus que de l'indignation. Il faut que chacun prenne conscience que des digues se sont brisées au cours de ces dernières années, peut-être encore davantage ces derniers mois", a renchéri Manuel Valls, qui a multiplié les attaques contre le Front national ces dernières semaines.

"Des dizaines et des dizaines de candidats du Front National tiennent des propos insupportables mais quand cela vient d'élus de mon département (l'Essonne, référence à Juvisy-sur-Orge, NDLR), nous attendons la condamnation la plus ferme de tous. On ne peut pas s'en prendre ainsi à une ministre de la République, ou tout simplement à une personne, au nom de son origine. Ce n'est ni la France, ni la République, ni nos valeurs", a conclu le premier ministre.

Sarkozy félicite Darmanin pour ses attaques

Le premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadélis a de son côté demandé "des sanctions" à l'égard d'Isabelle Guinot, première adjointe sans étiquette au maire UMP de Juvisy-sur-Orge (Essonne) Robin Reda, "qui agresse une nouvelle fois" Christiane Taubira "parce qu'elle est noire". "Il n'est pas possible qu'un parti républicain l'accepte donc j’attends ce que va dire Nicolas Sarkozy sur ce sujet", a-t-il ajouté.
Pour l'heure, le président de l'UMP n'a pa réagi à cette polémique. Mais à en croire Le Canard Enchaîné paru ce mercredi, Nicolas Sarkozy aurait félicité son ancien porte-parole Gérald Darmanin pour ses attaques contre la garde des Sceaux.
"Lui, il n'a pas peur. Vous êtes beaucoup trop timides. Pensez un peu moins aux journalistes et un peu plus à nos électeurs", aurait-il déclaré devant la commission exécutive de son parti, toujurs selon l'hebdomadaire satirique. Autrement dit : feu à volonté sur Christiane Taubira.