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Le Blog de Daniel HUE le Crouycien
2 octobre 2014

Le climat va-t-il faire exploser la commission Juncker ?

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Miguel Arias CaneteJugé sexiste et peu regardant sur les conflits d’intérêt, le candidat commissaire à l’action climatique et à l’énergie n’a pas convaincu les eurodéputés lors de son grand oral de mercredi. Son rejet semble peu probable, les élus de gauche cherchant à protéger le candidat socialiste français, honni par le gouvernement allemand.

De mémoire de député européen, c’est du jamais vu. Mercredi 1er octobre, avant même qu’il ne débute son audition devant la commission Environnement du Parlement européen, Miguel Arias Cañete avait tout le monde contre lui. Ou presque.

Lancée deux jours avant, une pétition électronique demandant son éjection du poste de commissaire à l’action climatique et à l’énergie recueillait plus de 380.000 signatures. Devant l’hémicycle bruxellois, des centaines de manifestants, certains affublés d’un masque du politicien, exigeaient son renvoi. A l’intérieur, certains eurodéputés étaient très remontés contre l’ancien ministre espagnol de l’environnement.

Propos sexistes

En cause, des propos sexistes tenus au printemps dernier, lors d’une émission télévisée : «Il est compliqué de tenir un débat avec une femme car montrer de la supériorité intellectuelle pourrait paraître sexiste», avait bravement déclaré l’éminent membre du parti populaire espagnol.

Ce n’est pas tout. Cet ex-ministre de l’agriculture et ses proches ont tissé des liens très étroits avec deux compagnies pétrolières. Comme parlementaire, Miguel Arias Cañete n’a eu aucun problème à présider le conseil d’administration de Petrolífera Dúcar SL et de Petrologis Canaris SL. Deux entreprises dont il détenait aussi 2,5% du capital, jusqu’à ces derniers jours.

Bien qu’il ait récemment cédé ses actions, les liens ne sont pas totalement rompus entre l’ancienne tête de liste du parti populaire européen (PPE) aux dernières élections européennes et l’industrie pétrolière espagnole. Son fils, Miguel Arias Domecq, est toujours membre du conseil d’administration des deux entreprises. Tandis que son beau-frère, Miguel Domecq Solís, préside leur conseil d’administration.

Pétrole et taureaux

A la ville, Miguel Arias Cañete est l’époux de Micaela Domecq y Solís-Beaumont. Cette aristocrate est propriétaire d’un élevage de taureaux de combat. Noble activité qui ne bénéficiait d’aucune aide européenne. Jusqu’à ce qu’un certain Miguel Arias Cañete, président de la commission agricole du Parlement européen, ne prenne le sujet par les cornes. Avec succès. Aujourd’hui, ce type d’élevage est éligible aux subventions de la politique agricole commune.

Peu sensible aux conflits d’intérêt, Miguel Arias Cañete n’a pas convaincu ses anciens collègues qui l’ont cuisiné trois heures durant sur les questions énergétiques et climatiques. Pourtant, a-t-il rappelé, sa participation aux sommets climatiques de Doha et de Varsovie (comme ministre de l’environnement espagnol) lui a «donné une très bonne connaissance des mécanismes de négociations internationales dans le cadre des Nations unies qui [lui] sera certainement utile lors des négociations à la conférence de Paris en 2015».

Programme généraliste

Sans surprise, son programme est des plus généralistes. «La sécurité de l'approvisionnement constituera une priorité immédiate étant donné la situation géopolitique actuelle.» Sans que l’on sache très bien comment, du jour au lendemain, la moitié de l’Union européenne se passera de gaz russe. Le candidat espagnol entend aussi «contribuer à la mise en œuvre du cadre en matière de climat et d'énergie à l'horizon 2030». Pour ce faire, il propose l’adoption de la «proposition législative existante pour une réserve de stabilité du marché au sein du système européen d’échange de quotas d’émission (SEQE) ?». Audacieux, il propose aussi de réduire l’allocation annuelle de quotas d’émission de gaz à effet de serre (GES).

Sans nous dire comment, Miguel Arias Cañete veut aussi réguler les émissions de GES des navires. Conformément à sa lettre de mission, le candidat va faire en sorte que l’Europe devienne numéro un mondial des énergies renouvelables en produisant le tiers de son énergie avec ses sources d’énergie propres. «Ce n'est pas seulement une question de sécurité de l'approvisionnement et de politique climatique responsable. Il s'agit aussi d'un impératif pour la politique industrielle», dit-il paraphrasant au mot près le courrier envoyé par Jean-Claude Juncker, futur président de la Commission européenne.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que ni Miguel Arias Cañete ni son programme Cañete n’ont suscité d’enthousiasme. «Loin d’être transparent, il n’a jamais été en mesure de distinguer son rôle de responsable politique de celui d’homme d’affaires lorsqu’il a évoqué sa carrière. Si sa connaissance des sujets est indéniable, ses choix pour l’avenir énergétique de l’UE s’avèrent en contradiction totale avec une vision durable de l’approvisionnement énergétique européen, mais absolument en ligne avec les intérêts commerciaux d’industries dont il est proche», résume Michèle Rivasi (EELV), dans un communiqué.

Dégâts collatéraux

Pour autant, les eurodéputés de gauche sont un peu gênés aux entournures. Certes, ils souhaitent le renvoi, ou tout du moins un nouvel oral, de Miguel Arias Cañete. Ce qui commence à faire beaucoup. Très chahuté par les membres (notamment britanniques) de la commission des finances, le candidat commissaire à la stabilité financière, Jonathan Hill devra, lui, retourner devant les parlementaires pour être nommé. Jugé très proche du peu démocrate Premier ministre hongrois, le candidat commissaire à l’éducation et à la culture, Tibor Navracsics, n’est pas certain lui non plus d’empocher son portefeuille ministériel.

Trois candidats estampillés PPE pourraient donc ne pas être adoubés par les députés. De quoi susciter l’ire des élus de la majorité conservatrice. Ces derniers ont d’ailleurs prévenu : si l’un de leurs candidats était renvoyé au bercail, le Français Pierre Moscovici (socialiste candidat au poste de commissaire à l’économie) serait sanctionné. A la grande joie du gouvernement allemand. Berlin n’a toujours pas digéré que Paris lui impose, comme commissaire à l’économie, un ancien ministre de l’économie et des finances qui s’est révélé incapable de maîtriser le déficit budgétaire français.

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