L’UMP, par la voie de sept communiqués distincts, a pris mercredi la défense de son président Jean-François Copé, objet de vives critiques du gouvernement et de la majorité après sa dénonciation dimanche d’un livre présenté comme recommandé aux enseignants pour les classes primaires.

Dimanche, Copé avait brandi et critiqué Tous à poil, un livre présenté comme recommandé aux enseignants pour les classes primaires : il s’agit en fait, selon le gouvernement, d’un ouvrage recommandé par une association encourageant la lecture chez les jeunes dans la Drôme et l’Ardèche, repris par l’académie de Grenoble. Le président de l’UMP s’est attiré en retour de vives critiques du gouvernement. Jean-Marc Ayrault a parlé de «délire», Vincent Peillon l’a accusé d’être «le porte-parole de groupes extrémistes», Michel Sapin a estimé qu’il ne se comportait «pas en républicain».

Michèle Tabarot«Alors que la Cour des comptes tire le signal d’alarme face au lourd dérapage du déficit public, tout ce que le gouvernement trouve à faire c’est de multiplier les attaques contre l’UMP et son président pour tenter de détourner l’attention des Français de leurs échecs dans tous les domaines», écrit dans un communiqué Michèle Tabarot, bras-droit de Copé (photo AFP).

De leur côté, Valérie Debord, déléguée générale de l’UMP, et Sébastien Huygues, délégué général adjoint et député du Nord, s’en sont pris à Vincent Peillon, citant tous deux un de ses livres, La révolution n’est pas terminée, paru en 2008. «On comprend mieux ainsi les sorties de Monsieur Peillon qui depuis le cannabis jusqu’au genre et en passant par ce qu’il appelle la 'religion laïque' a utilisé son ministère pour tenter d’imprimer son idéologie et façonner l’esprit de nos enfants! Voilà l’homme qui aujourd’hui a la haute main sur l’éducation de nos enfants!», s’indigne Debord.

Bruno BeschizzaPour Bruno Beschizza, secrétaire national UMP à la sécurité (photo AFP), «le gouvernement veut diaboliser Jean-François Copé pour masquer ses échecs et ses ambiguïtés», Copé ayant seulement «soulevé des questions que se posent des milliers de parents d’élèves inquiets de l’ambiguïté de ce gouvernement qui avance masqué sur la question du genre à l’école.»

«Le Gouvernement franchit la ligne jaune républicaine lorsqu’il attaque par l’infamie et l’insulte à l’opposition. Cette attitude nauséabonde ne l’honore pas. À l’échec généralisé, il ajoute l’indignité», écrit de son côté Camille Bedin, secrétaire générale adjointe de l’UMP.

«Ridicule», «censeur», «extrêmiste»...

Aurélie Filippetti 03Plus tôt dans la journée, diverses personnalités du gouvernement avaient réagi à la polémique lancée par le président de l'UMP. La ministre de la Culture Aurélie Filippetti (photo AFP) a estimé mercredi que Jean-François Copé «s’est ridiculisé» en critiquant le livre pour enfants Tous à poil, y voyant une volonté du président de l’UMP de «surfer sur la vague réactionnaire».«Les attaques contre la littérature jeunesse (...) sont vraiment scandaleuses et même ridicules, je crois qu’il s’est ridiculisé», a déclaré la ministre sur BFM TV/RMC, soulignant que le président de l’UMP avait «fait beaucoup de publicité à ce livre».

Copé «veut surfer sur la vague réactionnaire qui s’est exprimée dans certaines manifestations encore récemment (...). Je pense que c’est une erreur politique grave», a poursuivi Filippetti. «C’est de l’instrumentalisation des enfants et de l’instrumentalisation de l’attention que nous portons tous à nos enfants», a-t-elle déploré.

«L’objectif des livres pour enfants, c’est évidemment qu’ils soient lus avec les parents. Copé et certains disent qu’il faut rétablir l’autorité parentale, mais nous on fait confiance à l’autorité parentale», a-t-elle ajouté, réclamant de faire, «de grâce, un peu de place à l’humour dans cette société».

Najat Vallaud-BelkacemNajat Vallaud-Belkacem, porte-parole du gouvernement, (photo AFP) a également réagi mercredi, se disant «extrêmement choquée par le comportement de Jean-François Copé», le président de l’UMP, qui a dénoncé dimanche un livre qu’il avait présenté comme «recommandé aux enseignants» pour les classes primaires, intitulé Tous à poil.

«Le prochain coup d’éclat de monsieur Copé va sans doute consister à amener tous les livres qui lui déplaisent dans une brouette puis les brûler en place publique», a attaqué Najat Vallaud-Belkacem mercredi sur RTL. «Je suis extrêmement choquée par le comportement de Jean-François Copé. Vous voyez bien ce qu’il peut y avoir d’extrêmement dangereux à mettre en cause à la fois les enseignants de l’école de la République, les éditeurs, les auteurs de littérature jeunesse, à se faire censeur. Mais jusqu’où va aller monsieur Copé dans cette escalade incroyable qui dure maintenant depuis trop longtemps ?», a insisté la porte-parole du gouvernement.

«Je précise que Najat Vallaud-Belkacem n’écrit pas la littérature jeunesse, Najat Vallaud-Belkacem n’écrit pas les programmes pour les enseignants. Évidemment, la seule chose que le gouvernement demande, c’est que l’école, qui est dans son rôle, puisse assurer la transmission de valeurs aux enfants et notamment celle de l’égalité entre les filles et les garçons et du respect entre les filles et les garçons. Ensuite, les outils pédagogiques sont rédigés par les enseignants», a-t-elle poursuivi.

Au sujet de l’ABCD de l’égalité, outil pédagogique dans le viseur des organisateurs de boycott des écoles contre un supposé enseignement de la «théorie du genre», Najat Vallaud-Belkacem a déclaré : «Là où il est expérimenté, il est plébiscité par les enseignants et les parents».

Michel Sapin 02Le ministre du Travail Michel Sapin (photo AFP) a de son côté affirmé que le président de l’UMP Jean-François Copé «ne se comporte pas en républicain» et qu'«il valide la pensée Front national». Interrogé sur un sondage dans lequel 34% des Français disent adhérer aux idées du FN, Michel Sapin a accusé sur France Info Jean-François Copé «de lâcher lui-mêmes les vannes» sur les idées défendues par le parti de Marine Le Pen.

«Quand monsieur Copé s’exprime en s’appuyant sur les haines, sur les peurs, sur des approximations, sur des rumeurs, il tient exactement le même langage, il valide la pensée du Front national», a dénoncé le ministre du Travail. Dès lors, a-t-il ajouté, «comment ensuite pouvoir imaginer qu’il va pouvoir la retenir». Selon Michel Sapin, «Monsieur Copé ne se comporte pas en républicain, mais heureusement à l’UMP il y en a un certain nombre qui ne partagent pas cette pensée-là».

La Caricature de Daniel Hue

Copé précieux ridicule