La fraude n’est pas, majoritairement, là où on en parle

Le très complet bilan 2012 de la Délégation nationale à la lutte contre la fraude vient d’être rendu public. Sa lecture est très instructive, et nous donne des informations très utiles, même si nous demeurons interrogatifs pour savoir si l’augmentation des résultats est liée à l’augmentation des fraudes ou à une intensification de la lutte contre différentes formes de fraude.

Nous en retenons quelques chiffres qui nous donnent des ordres de grandeur et confirment que la fraude la plus importante n’est pas celle qui fait l’objet de l’attention médiatique la plus grande. Au total “les montants de fraude détectée au cours de l’année 2012 sont en augmentation de près de 20 % s’élevant à 4,629 milliards d’euros contre 3,864 en 2011“.

L’essentiel,et de très loin, 85 %, concerne les impôts puisque ‘l’indicateur qui mesure la fraude fiscale détectée à la DGFIP s’est élevé au cours de l’année 2012 à 3,66 milliards d’euros, soit une augmentation de 22 % par rapport à l’année 2011″.

On peut y ajouter la douane pour un volume de 8,5 % ”La Douane pour sa part enregistre des résultats de fraude détectée en légère augmentation en 2012, à un niveau proche de celui de 2011 : 366,5 millions d’euros au total, contre 363 millions en 2011“.

A côté le volume de la fraude sociale, constatée por l’ensemble des caisses est de l’ordre de 12 % ”La fraude détectée par les caisses de sécurité sociale au cours de l’année 2012 atteint  562,3 millions d’euros , soit 83 millions d’euros d’augmentation(+ 17,2%) par rapport à 2011″.

Quant à Pôle Emploi, si la fraude détectée est en hausse, elle demeure inférieure à 1 % de l’ensemble de la fraude “Pôle Emploi voit également le niveau de sa fraude détectée s’accroître en 2012 dans des proportions importantes avec plus de 39 millions d’euros de fraude détectée, soit un niveau supérieur de 20 % à l’année 2011″.

On mesure bien à travers ces chiffres que l’essentiel de la fraude est fiscale et que la fraude sociale se situe dans des proportions bien plus faibles.

De surcroit quand on regarde de plus près ce qui constitue la fraude sociale, la plus importante part tient au travail dissimulé et concerne donc les employeurs “La lutte contre le travail dissimulé constitue le champ le plus important de la lutte contre les fraudes aux cotisations et contributions sociales. Il représente un enjeu majeur de la valorisation des droits des salariés et du maintien d’une concurrence saine et non faussée entre les entreprises. En 2012, le montant total des sommes redressées au titre de la LCTI par les Urssaf dépasse le résultat historiquement jamais atteint de 260 millions d’euros.”

Quant à l’Assurance-maladie, ce sont les professionnels de santé qui sont les plus concernés par la fraude : infirmiers 17,3 millions d’euros, transporteurs 12,7 millions d’euros, médecins 7,4 millions d’euros, chirurgiens-dentistes 3,3 millions d’euros, pharmaciens 2,8 millions d’euros, masseurs-kinésithérapeutes 2,1 millions d’euros, soit au total 45,6 millions d’euros, chiffre à rapprocher de celui qui concerne les assurés ”Les fraudes détectées et stoppées en matière d’obtention des droits commises par des assurés en 2012 s’élèvent à 3,8 millions d’euros“.

Comme quoi la fraude n’est pas, majoritairement là où certains font commerce de la pourfendre (ce qui ne la rend pour autant admissible). On est conduit à conseiller la lecture de ce rapport à Dominique Tian, député UMP des Bouches du Rhône, dont l’obsessionnelle chasse à la fraude ne vise pas les secteurs où celle-ci est la plus importante. Comme s’il était plus important de stigmatiser les pauvres que de lutter réellement contre la fraude massive (voir La fraude sociale est d’abord celles des patrons, mais le contrôle concerne plus les assurés sociaux).