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Le Blog de Daniel HUE le Crouycien
7 mai 2013

Pesticides dans l’air : l’angle mort de la réglementation sanitaire

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Si vous habitez en Picardie, il y a de fortes chances que vous inhaliez (involontairement) de la chlorothalonil. Atmo Picardie a retrouvé ce pesticide organochloré dans 76% des échantillons d’air analysés pour réaliser une «étude  sur les résidus de produits phytosanitaires dans l’air en Picardie», commandée par le Conseil régional de Picardie dans le cadre de son programme d’actions de surveillance de la qualité de l’air. 47 molécules (sur 71 recherchées) ont été détectées au moins une fois dans l’air ambiant sur les quatre sites de mesure retenus. Avec une nette prépondérance des fongicides (23), des herbicides (20), puis des insecticides (4).

Des invariants, déjà décrits lors d’une étude AtmoFrance / Ineris, présentée en mars 2009, se retrouvent dans cette étude. Si les pesticides sont plus concentrés en milieu rural, on en trouve souvent en plus grande nombre en milieu urbain. Leur concentration varie en fonction de la période de l’année (les concentrations moyennes des molécules relevées en Picardie tournent autour de 0,41 ng/m3 [1]) et du lieu de mesure. A la contamination chronique de l’atmosphère s’ajoute une contamination épisodique pendant les périodes d’utilisation, le printemps et l’été étant les saisons les plus chargées en pesticides.

Cette  étude vient rappeler qu’il n’existe aucune norme, tant nationale qu’européenne, qui spécifie des limites de qualité sur le paramètre «pesticides» dans l'air, ainsi que le confirme le Commissariat général au développement durable (CGEDD) dans une parution récente portant sur les polluants atmosphériques [JDLE]. En 2000, l’Anses avait publié des «Recommandations et perspectives pour une surveillance nationale de la contamination de l’air par les pesticides», qui visait surtout à établir et harmoniser les pratiques au plan national. Ce vide réglementaire concerne tant les pesticides que les biocides, également en cause dans la diffusion de ces molécules mises en cause dans survenance de cancers, des troubles de la reproduction et neurologiques. La seule réglementation en place «vise à protéger la sécurité des denrées alimentaires produites à partir de végétaux», rappelle Atmo Picardie.

De ce fait, aucune valeur réglementaire pour comparer les prélèvements n’existe, ce qui a obligé les quelques organismes qui se sont penchés sur la question à ‘bricoler’ une norme –l’indice «phyto» [2]- basée sur la dose journalière admissible (DJA), à défaut d’utiliser une donnée de toxicité propre à l’inhalation. Les voies de diffusion sont, en revanche, bien connues. Un rapport d’Airparif, en 2007, rappelait que le transfert des pesticides dans l’atmosphère pouvait se faire «par volatilisation à partir du sol ou des plantes, par érosion éolienne et par dérive lors de l’épandage».

Les mesures d’Atmo Picardie ont également mis en évidence la présence de 4 molécules (dimethenamide, diuron,terbuthylazine, trifluraline), qui ne sont plus autorisées en France. Rémanence ou utilisation illicite; l’étude n’avance pas d’explication. Autre enseignement: la contamination de l’air intérieur par ces molécules actives. «Une comparaison entre air ambiant et air intérieur a mis en évidence que certaines molécules non détectées à l’extérieur l’étaient à l’intérieur et que des substances pouvaient présenter des niveaux plus élevés à l’intérieur», détaille Atmo Picardie.

«Il n'existe pas encore de normes, mais, contrairement à l'eau ou la nourriture, on ne choisit pas l'air que l'on respire. La première responsabilité des collectivités locales, c'est de tenir les gens informés», a déclaré au Courrier Picard François Veillerette, président de l’association Générations Futures spécialisée dans la question des pesticides, mais aussi vice-président du conseil régional de Picardie en charge de l'environnement. Chaque jour, 15.000 litres d’air circulent dans nos poumons.

[1] Où n= nombre de molécules suivies.

[2] Il permet de comparer des substances actives présentes en fortes concentrations mais ayant une DJA numériquement faible versus des substances actives présentes en faibles concentrations mais ayant une DJA élevée.

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