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Le Blog de Daniel HUE le Crouycien
14 décembre 2010

Regard très critique sur les fusions

Un peu plus d’un an après la première enquête menée dans le cadre de l’Observatoire de la Modernisation de l’État, Acteurs publics et l’Ifop, en partenariat avec Ineum Consulting, ont souhaité recueillir le ressenti et les opinions associés par les cadres publics aux fusions de services de l’État engagées ces dernières années dans le cadre de la Révision générale des politiques publiques (RGPP).

D’emblée, les hauts fonctionnaires de notre panel manifestent leur adhésion au principe des fusions engagées par les pouvoirs publics, près des trois quarts d’entre eux les jugeant justifiées (73 % exactement). Cette conviction très majoritairement partagée manque toutefois de fermeté, la proportion de cadres interrogés répondant “plutôt” est en effet nettement supérieure à ceux affirmant “tout à fait” (respectivement 54 % et 19 %). Elle se vérifie aussi toutes fonctions publiques confondues, les cadres hospitaliers étant toutefois plus nombreux à juger ces fusions justifiées (90 %). Ceux de l’État et de la territoriale apparaissent un peu plus nuancés (respectivement 71 % et 70 %).

En dépit de cette adhésion de principe, la mise en œuvre de ces fusions pâtit de fortes critiques. Six répondants sur dix s’accordent en effet pour juger leur bilan négatif, près d’un cinquième (19 %) le jugeant même “très négatif”. Près de trois personnes sur dix (29 %) émettent une opinion positive, un dixième environ (11 %) n’exprimant aucun avis, principalement dans les hôpitaux et les collectivités locales, indirectement concernées il est vrai. Notons que les avis exprimés penchent majoritairement du côté du pôle négatif dans l’ensemble des fonctions publiques, les jugements les plus sévères émanant des fonctionnaires de l’État et de la territoriale.

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Temps d’adaptation

Plus précisément, les critiques se focalisent sur la dégradation du service rendu aux usagers (seuls 26 % des répondants perçoivent une amélioration, 70 % exprimant un avis contraire) et de la charge de travail des fonctionnaires (89 % estiment qu’elle n’a pas été allégée). Deux autres enjeux bénéficient quant à eux de jugements plus nuancés et plus encourageants – quoique majoritairement négatifs – compte tenu du caractère encore récent de certaines fusions : une minorité non négligeable de cadres publics (47 % contre 48 % d’avis opposés) perçoit ainsi des gains de productivité permis par les fusions, une proportion à peine moindre (42 % contre 52 %) jugeant également qu’elles ont abouti à une organisation plus efficace de l’État.

L’évaluation du bilan tiré ou perçu des principales fusions opérées par entités ou types d’entités permet de nuancer quelque peu les critiques exprimées. Elle atteste aussi de la nécessité d’un temps d’adaptation et d’intégration des réorganisations mises en œuvre. À titre d’exemple, une majorité relative de personnes interrogées juge la fusion ayant abouti à la direction générale des Finances publiques (DGFIP) “plutôt réussie”, 43 % répondant par la positive et 24 % par la négative, soit un solde positif de 19 points. Les fusions de directions centrales des ministères suscitent des jugements plus contrastés, avec un solde négatif (- 8 points) mais nettement meilleur que ceux enregistrés à propos des directions régionales de l’État (- 19), des directions départementales interministérielles (- 21) et plus particulièrement de Pôle Emploi (- 48), qui a pâti, il est vrai, d’un contexte économique et social peu favorable en période de réorganisation.

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Manque de moyens

Invitées à se prononcer sur les moyens accordés dans le cadre des fusions engagées, les personnes interrogées, quelle que soit par ailleurs leur fonction publique d’appartenance, manifestent massivement l’insuffisance des outils ou dispositifs sur lesquels les cadres de l’État peuvent s’appuyer. Il est ainsi frappant de constater que seul un cinquième de ces derniers estime disposer des marges de manœuvre financières pour recourir à des sociétés de conseil extérieures spécialisés dans l’accompagnement du changement, une proportion similaire (19 % exactement) déclarant par ailleurs être bien armée en matière de formation à la conduite du changement. Parallèlement, les hauts fonctionnaires de l’État dans leur quasi-totalité déclarent ne pas disposer des marges de manœuvre nécessaires pour adapter la fusion qui les concerne aux spécificités de leur service (80 %) ou pour distribuer des primes aux agents les plus touchés par les fusions (79 %).

En conclusion, le principe des fusions de services bénéficie d’un accueil favorable parmi les cadres publics, mais sa mise en place s’avère compliquée par le manque de moyens. Et si, avec le temps, les jugements favorables progressent pour les réorganisations les plus anciennes, deux points noirs persistent : la qualité du service rendu aux usagers et la charge de travail des fonctionnaires.

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Yves-Marie Cann

Directeur d’études au département opinion de l’Ifop

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