Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le Blog de Daniel HUE le Crouycien
21 septembre 2010

Non à l’amendement n°730 qui abroge la médecine du travail

Logo_Smlt

A la veille de l’ouverture du débat sur la réforme des retraites à l’Assemblée nationale, le gouvernement, sur indication de l’Elysée, a déposé plusieurs amendements de dernière heure.
Le texte n° 730 introduit l’essentiel de la partie législative de la réforme de la médecine du travail, préparée par le ministre du travail. L’argumentaire du gouvernement pour justifier cette entrée en catimini de dispositions sans rapport avec le sujet est faux. « La mise en oeuvre des dispositions législatives relatives à la pénibilité fait jouer un rôle important, de fait, aux services de santé au travail ». Pourquoi ? Comment ? Faut-il rappeler au ministre du travail que ce sont les médecins conseils de sécurité sociale qui attribuent les IP, et non les médecins du travail ? L’argumentaire considère nécessaire « que les missions de ces services de santé au travail soient clairement définies par la loi ». Il estime que « Ce n’est pas le cas aujourd’hui puisque le code du travail reste centré sur les missions et l’action du médecin du travail » Faudrait-il acheter un code du travail à Monsieur Woerth ? Feinte ignorance, car le rédacteur, au fait du sujet, nous ressert les dispositions que le Medef, il y a un an, voulait faire signer par les organisations syndicales qui les ont repoussées à l’unanimité. La plus importante et la plus grave est constituée par l’abrogation de deux articles fondamentaux du code du travail :
Abrogation de l’article L.4622-2 qui stipule que : « Les services de santé au travail sont assurés par un ou plusieurs médecins qui prennent le nom de «médecins du travail» ;
Abrogation de l’article L 4622-4 qui note que : « les services de santé au travail font appel soit aux compétences des CRAM [...] soit à des personnes ou organismes [...] Cet appel aux compétences est réalisé dans des conditions garantissant les règles d’indépendance des professions médicales et l’indépendance des personnes ou organismes associés». Ces abrogations sont indispensables pour justifier l’amendement 730.

M_decine_du_TravailEn effet, il a pour objet exclusif de transférer aux services de santé au travail, donc à leurs directeurs, nommés et choisis par les employeurs, les responsabilités légales actuelles dévolues aux médecins du travail : «°conduire des actions de santé au travail visant à préserver la santé physique et mentale des travailleurs [...] les maintenir dans l’emploi. [...] conseiller [...] les employeurs, les travailleurs et leurs représentants [...] afin d’éviter ou de diminuer les risques professionnels et d’améliorer les conditions de travail. [...] assurer la surveillance de l’état de santé des travailleurs en fonction des risques concernant leur sécurité et leur santé au travail. [...] participer au suivi des expositions professionnelles et à la veille sanitaire. ».
Si cet amendement, qui prévoit l’application par décret de ces dispositions, est adopté, ce ne seront plus les médecins du travail qui seront chargés de la prévention médicale des risques professionnels, mais les employeurs responsables de l’organisation du travail et des risques qu’il font encourir à la santé des travailleurs qu’ils salarient. Si à l’occasion du débat sur les retraites, cette manoeuvre de pure opportunité permettait de voter l’amendement 730, les assemblées prendraient la responsabilité d’avoir, par une décision de couloir, voire de comptoir, non seulement abrogé la médecine du travail, mais également confié la santé au travail des salariés à leur propres employeurs.
L’importance du sujet mérite un traitement de haute tenue, et non une telle manipulation. Elle ne serait pas digne du rôle des représentants de la nation, chargés d’élaborer les lois. C’est pourquoi, nous demandons à tous les élus, quelles que puissent être leurs positions sur la médecine du travail, de renoncer au vote de cet amendement. Ils permettront ainsi qu’un réel débat sur l’avenir de la prévention des risques professionnels puisse se tenir dans les assemblées. Ce débat pourra, éventuellement, déboucher sur l’adoption de nouveaux textes.
Ils auront alors une légitimité que l’amendement 730 ne peut espérer.

Groupement national Sauvons La Médecine du Travail

Pour signer l'appel : http://www.slmt.fr/SLMT/Appel.html

Publicité
Publicité
Commentaires
F
Une nouvelle loi sur la médecine du travail contraire aux principes qui ont présidé à sa fondation, le 11 octobre 1946 ? Les élus de la nation prendront-ils cette responsabilité?<br /> <br /> Quelques sénateurs centristes ont saisi la Haute Assemblée d’un projet de Loi reprenant les articles de la loi sur les retraites qui concernaient la médecine du travail, mais invalidés par le Conseil Constitutionnel.<br /> <br /> Pourtant, par respect envers nos institutions, il est indigne des parlementaires d’adopter le texte censuré sans considération aucune sur le fait que la loi actuelle, issue du Conseil National de la Résistance, fut adoptée à l’unanimité des élus (dont des centristes) en 1946.<br /> <br /> Les sénateurs se présentant comme les « auteurs » de ce projet sont en réalité des plagiaires. En effet, leur texte n’est qu’un « copié – collé », encore pastillé en marge, des articles votés après des débats houleux et écourtés par l’urgence d’un coup de force législatif, décrété par le pouvoir. Loin d’un texte de réflexion, c’est une suite de propositions destructrices de la Loi de 1946, dictées par le Medef.<br /> <br /> L’« exposé des motifs » qui tente de justifier ce « projet de loi » est un concentré de contrevérités, d’insinuations reposant sur des bases erronées, et d’oublis frisant le mensonge. Ainsi, après une introduction faite d’indigentes banalités, les auteurs présentent leur initiative « comme valorisant le travail législatif ainsi accompli en permettant une entrée en vigueur que l’on espère rapide ». Promulguer à la va-vite un texte bâclé, pris dans l’urgence politique d’une autre loi, c’est ce que ces sénateurs appellent de la valorisation.<br /> <br /> Ils affirment que « l’indépendance des médecins, [..], mais également de tous les intervenants en prévention des risques professionnels est fondamentale pour obtenir la confiance des travailleurs ». Mais ils présentent un texte qui confie les missions de prévention à leurs employeurs. Aucune disposition du texte ne garantit ni l’indépendance des médecins du travail ni celle des « IPRP ». Les seules dispositions qui garantissaient cette indépendance sont abrogées. L’article L.4622-2 qui précise que « Les services de santé au travail sont assurés par un ou plusieurs médecins qui prennent le nom de médecins du travail. » est remplacé par : « Les services de santé au travail ont pour mission exclusive d’éviter toute altération de la santé des travailleurs du fait de leur travail ». Or, selon l’article L.4622-1, inchangé, ce sont les employeurs qui organisent les services de santé au travail. Ce sont eux, et eux seuls qui les dirigent, se rassemblent en associations (loi 1901) pour en déterminer les moyens, les objets, et désigner leurs responsables.<br /> <br /> En outre, en préconisant un faux « paritarisme », avec voix prépondérante du président, les sénateurs centristes confient la gouvernance des services de santé au patronat, et suppriment dans le même temps le contrôle social et l’accord indispensable des représentants des salariés en ce qui concerne nomination, licenciement, changement d’affectation des médecins du travail.. En effet, l’article L.4623-4, inchangé, précise que « tout licenciement d’un médecin du travail envisagé par l’employeur est soumis pour avis… à la commission de contrôle du service interentreprises » où les représentants des salariés sont majoritaires, mais que « Dans les services interentreprises administrés paritairement, le projet de licenciement est soumis au conseil d’administration », car il n’existe pas de commission de contrôle dans les services à gestion paritaire.<br /> <br /> Pour ces exégètes, le protocole d’accord, proposé le 11 septembre 2009 par le Medef aux syndicats, aurait été initié par le gouvernement en « proposant un document d’orientation ayant servi de base aux discussions ». Il a été récusé par tous les syndicats, « bien que plusieurs points de consensus aient été dégagés ». Les sénateurs centristes ont décidément la culture du consensus facile. Ils vont même jusqu’à préciser que « c’est à la suite de l’échec mais dans la continuité du travail engagé par les partenaires sociaux que le ministre a présenté » sa réforme. Sur ce point, ils ont raison : c’est d’échecs en échecs, dans la continuité des mensonges et des faux-semblants que cette réforme a été menée. Ils ont d’ailleurs du mal à lire leur propre texte, puisqu’ils y croient voir « généraliser les équipes pluridisciplinaires [qui n’existent pas], coordonnées [au lieu d’animées] par les médecins du travail ».<br /> <br /> Mirage après mirage, ils confondent les conséquences et les causes. Le texte ne propose de « tenir compte de la démographie médicale » que pour transférer les missions et compétences des médecins du travail à d’autres (employeurs et intervenants sans protection et donc sans moyens d’indépendance). Il n’est nullement question de prévention de la désinsertion professionnelle en cas d’inaptitude dans le texte présenté, mais les sénateurs centristes font l’apologie de cette notion. Cette proposition émane du MEDEF dans le texte présenté aux syndicats. Elle avait pour objet de faciliter le licenciement des salariés malades, en préparant la rupture du contrat de travail durant l’arrêt de travail. Si le projet de loi proposé par ces élus est voté, le gouvernement pourra par décret donner satisfaction au Medef sur ce point comme sur d’autres.<br /> <br /> Les élus centristes signalent l’importance « d’un contrôle par les représentants des salariés », alors que le terme « commission de contrôle » est absent d’un texte qui traite principalement des services interentreprises de santé au travail. L’une des plumes du Medef pour cette « réforme », Gilles Leclercq, écrivait récemment que « le projet de réforme des services de santé au travail a donné lieu à de nombreuses réactions négatives et affirmations erronées ». Le texte proposé par les sénateurs centristes fait la démonstration que les affirmations positives peuvent également être particulièrement erronées.<br /> <br /> Mais ce qui peut se concevoir s’agissant de « cavaliers » législatifs n’est pas admissible pour un « projet de loi ». Ce texte qui vise à modifier en profondeur la loi sur la médecine du travail n’évoque même pas le principal problème à résoudre, celui du déficit démographique des médecins du travail. Or ce déficit est en train de rendre caduque la loi de 1946, c’est-à-dire la prévention médicale des risques professionnels, la connaissance des pathologies professionnelles, la spécialité médicale ayant pour objet la santé des travailleurs.<br /> <br /> Ces cinq sénateurs, qui ne connaissent pas le texte qu’ils proposent, ont une piètre idée du débat des élus de la République. Ils peuvent envisager que ceux-ci acceptent de discuter et de voter, sans aucune modification, des articles imposés par le gouvernement, suite à un coup de force législatif, sanctionné par le Conseil Constitutionnel, sans même y changer un espace de dactylographie. <br /> <br /> Les sénateurs centristes semblent servir un autre mandat que celui que leur ont confié leurs électeurs. Le Sénat ne devrait pas accepter cette façon de légiférer. Que les moyens mis à disposition des services de santé au travail, que la gouvernance des services et leur contrôle social effectif aient besoin d’être renouvelés, nul ne le conteste. Les liens entre professionnels des services de santé au travail et ceux des organismes de sécurité sociale méritent d’être développés, bien entendu sous le contrôle des instances représentatives des travailleurs, pour accroître l’efficacité des actions préventives.<br /> <br /> S’il faut modifier la loi de 1946, c’est une autre loi qui doit le faire, après un réel débat social et parlementaire autour de choix éclairés. Il y aurait une injustice de plus si, à l’occasion d’une manœuvre procédurière, 20 millions de salariés se voyaient privés des garanties élémentaires pour leur santé au travail sans que le sujet n’ait réellement été discuté. En tant que médecins du travail, nous ne pouvons pas accepter une marchandisation de la santé au travail. Les marchands frappent à la porte. Tout le monde les entend. Il est scandaleux, de la part de sénateurs, d’inviter les assurances à occuper les antichambres des directeurs des services de santé au travail pour participer au grand marché de la prévention. Il est dégradant pour ces élus d’abandonner aux employeurs le sort des salariés malades ou affaiblis, à plus forte raison sans en avoir reçu mandat de leurs électeurs.<br /> <br /> On ne comprend pas un tel empressement de ces élus à promouvoir le projet du MEDEF au mépris de la dignité des institutions parlementaires. Veillons à ce que cette tentative peu glorieuse échoue elle aussi !<br /> <br /> Le 20 novembre 2010<br /> ----------------------------------------------------------------<br /> Groupement National Sauvons la Médecine du travail<br /> http://www.slmt.fr<br /> contact@slmt.fr
Répondre
C
2 sites :<br /> http://www.istnf.fr/<br /> http://www.cisme.org/
Répondre
B
Le CISME dont les adhérents s'occupent de 14 millions de salariés a aussi une lecture positive de la réforme proposée:<br /> "Après avoir été, pendant près de 60 ans, les seuls acteurs de l'institution, il est compréhensible que certains médecins du travail aient du mal à appréhender le nouveau périmètre au sein duquel ils exercent, au point qu'un de leurs syndicats leur propose, pour retrouver leurs repères, un futur où les Services interentreprises seraient dirigés par des médecins, au motif qu'ils seraient les seuls garants de l'institution.<br /> Cette analyse fait peu de cas des garanties qu'apportent les partenaires sociaux au sein des conseils d'administration et des commissions de contrôle. Elle ignore le rôle moteur des professionnels au sein des commissions médico-techniques. Elle passe sous silence les garanties apportées par le statut protégé des médecins du travail et des autres intervenants de prévention, par la tutelle, par l'agrément, par la supervision des médecins inspecteurs régionaux."<br /> <br /> Voir le texte du CISME sur le sujet
Répondre
C
Messieurs : <br /> - Christian Dellacherie (membre du Conseil économique, social et environnemental),<br /> - Mr. Paul Frimat (Professeur de médecine du travail à l’Université de Lille II, praticien hospitalier au CHRU de Lille, Président du conseil scientifique de l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail [Afssa])<br /> - Mr Gilles Leclercq (Médecin conseil de l’ACMS),<br /> ayant publié le rapport ci-dessous<br /> <br /> Rapport : La santé au travail. Vision nouvelle et professions d'avenir - Propositions pour des formations et un réseau de recherche en phase avec les missions (publié sur le site http://www.travailler-mieux.gouv.fr/),<br /> <br /> Télécharger le rapport : http://lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/cgi-bin/brp/telestats.cgi?brp_ref=104000434&brp_file=0000.pdf<br /> <br /> il n’est donc pas étonnant que Paul Frimat ait une autre lecture de l’amendement en question…
Répondre
B
Paul Frimat, professeur d'université en médecine du travail, spécialiste reconnu de ce sujet, salut dans un texte très argumenté les "propositions innovantes et attendues" sur la réforme de la santé au travail et de la médecine du travail votée le 15 septembre 2010 à l'Assemblée nationale.
Répondre
Le Blog de Daniel HUE le Crouycien
Publicité
Visiteurs
Depuis la création 842 190
Publicité