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Le Blog de Daniel HUE le Crouycien
19 octobre 2013

RSA : retour à la case Etat, ou l’échec annoncé de la réforme de François Fillon

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Depuis 2004 ce n’est plus l’Etat qui est responsable du versement du RMI, mais les conseils généraux. La transformation de celui-ci en RSA n’a rien changé à ce point.

C’est en effet la loi impulsée par le Ministre des affaires sociales de l’époque, un certain François Fillon, qui a décidé de ce transfert, organisé par la loi no 2003-1200 du 18 décembre 2003. Cette loi rendait les départements pleinement responsables du RMI, en les rendant responsables du versement de l’allocation, auparavant confiée à l’Etat, et en supprimant “l’obligation légale” de financement par les conseils généraux de dépenses pour l’insertion des bénéficiaires, à hauteur de 20 % des sommes consacrées par l’Etat à l’indemnisation des bénéficiaires (pourcentage ramené à 17 % après la création de la Couverture Maladie Universelle).

La logique qui fondait cette loi était simple : les départements ont intérêt à investir dans l’insertion puisque cela facilitera la sortie du RMI et donc réduira leur dépense en matière d’indemnisation.

Dix ans après le vote de cette loi, entrée en application au 1 janvier 2004 il faut bien en constater l’échec, puisque de nombreux départements réclament le retour de cette responsabilité à l’Etat. Car il faut bien constater que le pari fondateur de ce transfert ne s’est pas concrétisé et que le choix de transférer ce versement a mis les départements en grande difficulté.

En première ligne le conseil général de la Réunion, dont la présidente est Nassimah Dindar, également présidente de la commission outre-mer de l’Association des Départements de France, qu’on a du mal à classer politiquement : élue en tant que UMP, conseillère politique chargée de la diversité auprès de Nicolas Sarkozy en 2007, elle s’est alliée avec la gauche pour garder le présidence du département en 2008 avant de se présenter, sans succès, aux législatives en 2012 sous l’étiquette Modem puis d’adhérer à l’UDI, en attendant le suite du parcours.

Il n’est pas étonnant que ce soit ce département qui, le premier, monte au front pour réclamer le retour à la responsabilité de l’Etat tant, vu le nombre de bénéficiaires dans l’île le RMI, et aujourd’hui le RSA pèsent dans le budget de la collectivité, avec une perspective d’augmentation de 50 millions d’euros pour 2014.

L’article 1 de la loi prévoyait :

“Les charges résultant, pour les départements, des transfert et création de compétences réalisés par la présente loi sont compensées par l’attribution de ressources constituées d’une partie du produit d’un impôt perçu par l’Etat dans les conditions fixées par la loi de finances.

Au titre de l’année 2004, la compensation prévue au premier alinéa est calculée sur la base des dépenses engendrées par le paiement du revenu minimum d’insertion en 2003″.

Depuis ce sont les départements qui doivent sur leur budget faire face à l’augmentation des dépenses, la compensation par l’Etat gardant pour base les sommes qu’il y consacrait en 2003.  C’est d’ailleurs ce que déclarait sans ambiguïté François Fillon devant le Sénat lors de la présentation de la loi le 26 mai 2003 ”Il n’est pas prévu de faire varier la ressource transférée en fonction de l’évolution de la dépense, car sa répartition sera fondée sur le constat des dépenses réalisées par l’Etat avant la décentralisation”.

 Tout semble montrer que l’Etat n’avait pas envisagé que l’évolution défavorable puisse fortement alourdir la charge des départements. A moins qu’il ne l’ait, au contraire, trop bien perçu, et construit, sans l’assumer, une stratégie d’étouffement. D’ailleurs le rapporteur de la loi pour la commission des finances, Michel Mercier, sénateur centiste du Rhône, déclarait “Il n’y aurait rien de pire sinon que de transférer aux départements une dépense qui évolue relativement vite non seulement du fait de l’augmentation du nombre des allocataires, mais aussi parce que ni vous-même ni ceux qui, dans de nombreuses années, vous succéderont ne prendront l’engagement de ne jamais augmenter les minima sociaux”.

Pourtant l’opposition de l’époque avait bien mis en évidence le danger de ce transfert, comme l’exprimait Claude Domezeil, sénateur PS des Alpes de Haute-Provence, le 10 décembre 2013, lors de l’explication de vote final.

“Tout cela va créer des inégalités sociales et territoriales, car tous les départements devront faire face à ces nouvelles charges, quelles que soient leurs possibilités financières. Elu d’un département où l’ensemble du conseil général, notamment le président, tire déjà le diable par la queue, je peux vous dire que ce dispositif va aggraver sa situation”.

Il faut ajouter que cette dépense présente deux défauts, rédhibitoires, pour les départements : elle est une obligation envers les bénéficiaires qui ne peut être limitée par le montant des inscriptions budgétaires, ce qui réduit la fiabilité des budgets prévisionnels, et elle est versée par les CAF (et pour une faible part par la MSA pour ses ressortissants), ce qui rend l’intervention du conseil général non perceptible pour les bénéficiaires, qui sont aussi électeurs, alors que c’est le président du conseil général qui est devenu responsable des décisions de suppressions et suspensions de l’allocation, la loi de 2003 lui ayant donné cette responsabilité qui était auparavant l’apanage du préfet.

Reste à savoir si l’Etat va donner suite à cette demande. Ce n’est pas gagné car dans la situation budgétaire il est assez content de faire reposer la croissance de la dépense sur les départements, tout en leur enjoignant de réduire leurs dépenses.

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