Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le Blog de Daniel HUE le Crouycien
13 juillet 2013

Retour sur - La canicule de 2003, de l'inertie à la prise de conscience

Logo AFP

Août 2003 : une canicule s'abat sur l'Europe, qui va causer la mort de 15.000 personnes en France et ébranler le gouvernement. Dix ans plus tard, des leçons ont été tirées mais beaucoup reste à faire pour rompre l'isolement des personnes âgées.

Après un mois de juillet déjà chaud, une nouvelle vague de chaleur touche début août la majorité des pays européens cette année là, entraînant des températures records -parfois plus de 40°- et des pics d'ozone dans certaines villes. C'est l'été le plus chaud depuis 1873 dans la capitale.

La France supporte silencieusement cette chaleur mais au bout d'une semaine, le scandale éclate par la voix du président de l'Association des médecins urgentistes hospitaliers Patrick Pelloux, qui dénonce la gestion "scandaleuse" de la canicule dans les hôpitaux, où l'on entasse les personnes âgées sur des brancards dans les couloirs. Il parle d'une "hécatombe", avance le chiffre d'une "cinquantaine de morts" en quatre jours en Ile-de-France et interpelle le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, dont les principaux responsables ont quitté Paris.

Aujourd'hui, Patrick Pelloux porte un jugement sans appel sur l'inertie des politiques à l'époque : "malgré les alertes, aucune réponse n'a été apportée", estime-t-il, évoquant une "incompétence de l'Etat".

La Direction générale de la Santé (DGS) déclare alors ne posséder aucune statistique réelle, mais reconnaît que "les excès de chaleur sont clairement associés à l'augmentation de la mortalité".

Le lundi 11, les hôpitaux d'Ile-de-France décident de passer au niveau 2 du Plan d'action chaleur extrême (PACE). Le préfet de police de Paris Jean-Paul Proust dira n'avoir été au courant de rien avant cette date et le ministre de la Santé Jean-François Mattei affirme ne pas avoir sous-estimé les conséquences d'une canicule qui "n'était pas prévisible".

Le mardi 12, Patrick Pelloux annonce plus de 100 décès liés à la chaleur. Le lendemain, les Pompes funèbres générales font état d'une hausse des décès de 49% en Ile-de-France et de 37% en France par rapport à 2002. Une chambre froide de Rungis sera aménagée en morgue jusqu'à ce qu'elles puissent faire face à la situation.

Un mot rentré dans la conscience collective

Le Premier ministre demande aux préfets d'Ile-de-France l'activation du "plan blanc", mobilisation des moyens hospitaliers prévus en cas d'épidémie, catastrophe ou attentat et l'étend à toute la France le lendemain. En vacances au Canada, le président Jacques Chirac fait savoir qu'il "suit précisément l'évolution de la situation".

Mis en cause par le ministre de la Santé, le directeur général de la Santé Lucien Abenhaïm démissionne le lundi 18 août.

L'Inserm chiffrera les morts de la canicule à 14.947 entre le 4 et le 18 août et parlera, dans son rapport de janvier 2004, de "catastrophe sanitaire".

La canicule a aussi mis en lumière la solitude de personnes âgées : 58 morts durant l'été, ne seront "réclamés" par personne.

En septembre, le Premier ministre Jena-Pierre Raffarin annonçait la création d'une "journée de solidarité" pour les personnes âgées.

"On a tiré des leçons de cette crise", analyse aujourd'hui Bernard Ennuyer, sociologue de la vieillesse. "Les villes ont pris des mesures, des pièces rafraîchies sont prévues dans les maisons de retraite", souligne-t-il par exemple. "Les politiques ont découvert qu'il y avait des personnes âgées, mais encore faut-il les considérer comme des citoyens à part entière", juge-t-il. "Beaucoup reste à faire en matière de solidarité".

Un "plan national canicule" est désormais activé chaque année du 1er juin au 31 août. Il prévoit notamment la mise en oeuvre d'un système d'alerte, la diffusion de documents d'information ou la mise en service d'un numéro vert.

"La France ne pourrait plus passer à côté d'une canicule", estime-t-on au cabinet de la ministre en charge du sujet, Michèle Delaunay. Mais "l'isolement de nombreuses personnes âgées reste le coeur du sujet", reconnaît-on. Le gouvernement a d'ailleurs lancé un projet, baptisé Monalisa, qui vise à promouvoir des actions bénévoles de proximité pour rompre cet isolement.

Dix ans après l'événement, Patrick Pelloux dresse, lui, un constat sévère. "La seule chose qui ait changé c'est que le mot +canicule+ est entré dans la conscience collective et que les politiques de prévention ont donné certains résultats". Mais parallèlement "les moyens de l'hôpital n'ont cessé de baisser", tonne-t-il. "Cela fait toujours dix ans qu'on réclame la non-fermeture de lits l'été".

bur-ito/db/fm

Publicité
Publicité
Commentaires
Le Blog de Daniel HUE le Crouycien
Publicité
Visiteurs
Depuis la création 841 989
Publicité