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Le Blog de Daniel HUE le Crouycien
13 juin 2012

"Que reste-t-il maintenant du gaullisme à l’UMP" ?

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INTERVIEW - Historien français spécialiste de l’histoire de la République française, Michel Winock a publié au début de l'année La droite, hier et aujourd'hui. Pour leJDD.fr, il analyse la stratégie du 'ni-ni" choisie par l'UMP en vue du second tour des législatives. Et s'interroge sur les relations entre la droite républicaine et l'extrême droite.

L'UMP a choisi de maintenir ses candidats partout, et de n'appeler à voter ni pour le FN, ni pour le PS, contrairement au Parti socialiste. Est-ce une surprise?
La droitisation de l’UMP, entamée depuis le discours de Grenoble de Nicolas Sarkozy en juillet 2010 - droitisation confirmée par la création d’une "Droite populaire" en son sein et par la campagne du président sortant -, laissait prévoir son choix au second tour de ces législatives. En quoi l’UMP peut-elle désormais se targuer d’appartenir à la "droite républicaine"?

Pouvait-elle faire autre chose?
L’ouvrage de Nathalie Kosciusco-Morizet consacré au Front national proposait un autre comportement. Elle préférait, dans le cas d’un duel entre un candidat FN et un candidat socialiste, voter pour le socialiste. Mais la porosité entre l’UMP et le FN, impensable sous Jacques Chirac, est de plus en plus évidente : la gauche, voilà l’ennemi! Et non pas le national-populisme.

Certains ténors de la droite républicaine sont mal à l'aise avec ce positionnement du "ni-ni"…
Oui, parce qu’il existe encore une tradition républicaine dans l’UMP, mais elle apparaît désormais minoritaire. Le travail de "dédiabolisation" de Marine Le Pen a permis de faire sauter le verrou qui fermait tout accord avec son père.

"L’UMP va être confrontée au choix entre deux lignes possibles"

En assurant partager les "mêmes valeurs que le FN", Nadine Morano a-t-elle "fait sauter le verrou" elle aussi?
Nadine Morano ne fait qu’exprimer, de manière brutale, selon son style, ce que nombre d’électeurs et d’élus de droite pensent au fond d’eux-mêmes.

Mais pourquoi s'afficher en Une de Minute?
La stratégie électorale de Nicolas Sarkozy, inspirée par son conseiller Patrick Buisson, ex-collaborateur de Minute, a été de récupérer les électeurs lepénistes que le candidat de 2007 avait su si bien séduire mais qu’il avait perdus d’après les sondages. S’afficher à la Une de Minute est dans la même logique.

La visite annoncée de François Fillon à Toul vaut-elle adhésion aux propos de Nadine Morano?
Il y a une logique partisane qui pousse les appareils et leurs leaders à soutenir leurs candidats quels qu’ils soient. On a vu cette logique à l’œuvre également au PS dans le cas de François Bayrou. À l’UMP, les plus rétifs aux slogans de la campagne du président sortant se sont murés dans le silence : ne pas gêner son camp, son parti, vaincre à tout prix. Si désaccord il y a, on en parlera après les élections!

Nadine Morano n'est pas la seule à se rapprocher du FN. L'UMP ne doit-elle pas faire son aggiornamento idéologique?
L’UMP va être confrontée au choix entre deux lignes possibles. Soit maintenir une ligne à la Chirac, opposée à toute complaisance, à toute alliance avec le FN, rester résolument attaché aux valeurs de la droite républicaine et "humaniste" comme dit Jean-Pierre Raffarin. Soit se rapprocher du FN de manière plus ou moins subreptice, ou, l’événement en décidera, plus ou moins éclatante. Il y a aujourd’hui au sein de l’UMP des élus et des militants aux yeux desquels le rapprochement apparaît nécessaire. On verra s’ils seront cause ou non d’une scission. Le prochain congrès de l’UMP risque d’en être le lieu et le moment.

Une fusion entre l'UMP et le FN est-elle, à terme, envisageable?
Il faut lever les yeux au-delà du cas français. Dans toute l’Europe, sauf quelques rares pays, on a vu se développer des partis populistes. Certains ont passé des accords avec la droite classique pour partager le pouvoir. En France, ce type d’alliance a été jusqu’à présent impossible en raison de l’héritage gaulliste. Mais que reste-t-il maintenant du gaullisme à l’UMP? Les alliances entre la droite classique et l’extrême droite peuvent prendre des formes diverses, pas forcément un "programme commun" : les consignes de l’UMP pour le second tour de ces législatives confirment la dérive, notable depuis 2010, par rapport aux valeurs républicaines. On peut imaginer que ce n’est qu’un début. D’un autre côté, le risque réel d’implosion du parti peut freiner le processus.

* La droite, hier et aujourd'hui, aux éditions Perrin, 272 pages

Benjamin Bonneau - leJDD.fr

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